28 juin 2009

BLACKBERRY, TWITTER ET LA VRAIE VIE

Il n'y a rien de pire que le blackberry de son interlocuteur pendant une réunion de travail. A une époque où le rendez-vous en face à face n'intervient qu'en dernier recours, quand on aura épuisé toutes les possibilités de mails et de coups de téléphone, c'est toujours un plaisir de prendre 2h pour un point qui aurait pu être reglé en 15 minutes si la vibration permanente ne coupait pas le fil...

Il y a quelques années, quand on n'imaginait pas qu'un jour on aurait des portables qui nous dirait le nom de la musique qui passe dans la rue, j'avais entendu parler d'un hôtel de luxe où les traders américains partant en vacances se faisaient confisquer leur blackberry, stocké au coffre, pour décrocher. Je trouvais ça amusant, un peu exagéré, ça me dépassait qu'on puisse en arriver là.

Le temps a passé depuis...A chaque diner, toujours une personne le téléphone à la main fait vivre la soirée par procuration aux absents.
Je me suis officiellement mise sur Twitter. J'avais l'étrange impression, depuis quelques temps, que lorsque je répondais 'Je ne suis pas sur Twitter', j'étais un peu l'ado de 14 ans qui aurait dit 'Non, je n'ai pas msn'.
Maintenant, je peux savoir que les gens à côté de moi, ceux qui ne me parlent pas, postent au reste du monde qu'ils passent une excellente soirée.

Je ne sais pas quoi penser du phénomène...Une envie passéiste passagère me ferait pencher pour un 'on passe notre temps à se parler en virtuel mais ce ne sont pas des liens réels' et j'observerai avec un peu de regret cette nouvelle génération... Ils ne connaitront pas les coups de fils aux copains pour essayer de retrouver un garçon qu'ils ont vaguement aperçu à une fête ('je chercherai sur facebook'), il n'enverront pas de lettres d'amour ('pourquoi je perdrais deux jours et je paierai un timbre ?'), ne pourront pas se dire 'je coupe les ponts' puisqu'ils pourront savoir ce que fait en temps et en heure ceux qu'ils ne veulent plus voir.
Pardon pour les plus jeunes, je vous parle d'un temps, que ceux qui n'ont pas connu le bip du modem qui se connecte, ne peuvent pas connaitre.

Et puis finalement, je me reprends. Je ne suis pas aussi sure que je l'aurai cru du méfait des nouveaux médias sur les relations. J'ai eu des coups de coeur sur des chats, dragué sur msn et quitté par texto. Je n'ai pas eu l'impression que tout ça était moins vrai, que les sentiments et les liens qui me liaient à ces gens, à ces moments, n'était pas aussi intéressants que ceux que j'ai vécu en face. S'il semble qu'il existe encore une hiérarchisation de l'importance que l'on donne au message selon le support utilisé (dans l'ordre : en face à face / lettre / téléphone / mail / texto / facebook / ichat / twitter), jusqu'à quand ? Ceux qui n'ont jamais écrit une lettre n'accorderont jamais plus de crédits à celle-ci qu'un mail bien tourné. Et combien de mots jamais envoyés par la poste alors que s'il avait fallu juste appuyer sur un bouton, ca n'aurait pas été pareil? La multiplication des médiums n'a pas changé la véracité des moments, elle en a juste changé les règles. Et quand bien même ce serait le cas, on n'a déjà plus vraiment le choix.

Tant pis, s'il faut choisir, je crois que je préfère des gens qui disent à tout le monde qu'ils passent un joli moment, même s'ils ne me le disent pas qu'à moi, que ceux qui ne me le diront jamais.