26 mai 2009

COFFEE TABLE BOOKS

Vous connaissez ce nom? Ce sont ces jolis livres, qu'on laisse nonchalamment trainer sur la table basse du salon, ni trop rangés ni trop déclassés, censés supposer aux amis qui pénètrent chez nous qu'on est toujours en train de feuilleter une rétrospective d'un artiste inconnu quand on traine chez soi. Ça vous rappelle quelqu'un ? Moi aussi.

Le coffee table book, c'est l'anti-Twilight, Harry Potter et consort, l'anti-livre qu'on a aimé et qu'on ne montre jamais. (Twilight, pour les garçons qui n'ont pas de copines et ne voient donc pas la face cachée de l'iceberg, ça mérite une parenthèse: Histoire d'amour de vampires destinée aux adolescentes midinettes de 15 ans, il a été lu ou vu par la moitié des filles qui vous entourent. Par contre, n'essayez pas de leur en parlez, elles nieront.)

A l'opposé, le Coffee Table Book, on adore l'acheter et le revendiquer mais on a plus de mal à le feuilleter. Il nous fait rêver chez le libraire, on a déjà envie de le dévorer et puis finalement, il ne s'avère pas pratique, pas adapté et on y prend moins de plaisir qu'on ne l'aurait imaginé.

Mais au-delà de ce qu'il conte, c'est ce qu'il signifie qui compte. Le Coffee Table Book, c'est un élément clé du style de vie, chargé de signification et de messages, comme le téléphone portable des années 90/2000. Plus que ce que l'on est, il est souvent le reflet de ce que l'on voudrait être. Loin d'une culture populaire, il est le reflet un élitisme certain. De leur rareté dépend leur valeur : faire de soi un initié.

Comment reconnaitre un bon coffee table book ? Si AD dresse ce mois-ci sa propre sélection, quelques règles sont à respecter :

> Le Coffee Table Book est pointu. S'il s'agit de revendiquer ce que l'on aimerait être, autant en rajouter dans l'élitisme. Comme on souhaiterait connaitre tous les artistes qui montent, passer son temps dans des vernissages et à des concerts parfois incompatibles avec une vie bien remplie, le livre peut au moins 'donner l'illusion que'.

> Le Coffee Table Book est plein d'images. Biensûr, il finira par être lu - enfin approfondi car il a déjà été lu chez le libraire avant d'être acheté - mais il sera surtout regardé. Regardé par tous les invités qui combleront ainsi un moment d'ennui pendant un diner et qui feuilletteront les pages avec un air absorbé. Il doit, de fait, donner l'impression d'être passionnant et intelligent en quelques secondes, pour démontrer immédiatement notre bon goût.

> Le Coffee Table Book est étranger. Souvent anglais, quand ce n'est pas japonais ou suedois, peu importe la langue d'un livre qu'on ne lit pas. 2 raisons à cela, étroitement liées aux deux premiers points : soit on ne regarde que les images et dans ce cas, pas besoin de textes ; soit on cherche un ouvrage pointu, et celui-ci n'a pas toujours (jamais ?) été traduit.




> Le Coffee Table Book est rare. Récent ou ancien, la difficulté à le trouver témoigne d'une capacité à chercher (librairies d'initiés ?) ou, dans le cas d'une série limitée, à être au courant avant les autres. Mieux que la dernière paire de baskets annoncées sur la MJC.





> Le Coffee Table Book est sujet à polémique. Un peu de cul, un peu de trash, un peu d'impertinence, il faut aussi parfois qu'il choque ou qu'il surprenne. Qui a envie de passer pour le coincé de service? Un mec nu en couverture et hop, sauvés !



Comme n'importe quel produit de mode, trouver le bon 'It book', c'est placer le baromètre entre deux envies : distinction & imitation. Imitation de son groupe auquel on emprunte les codes, distinction en tentant de se montrer 'mieux que lui' en trouvant toujours plus pointu, plus étrange, plus rare. Un élément de son style qui n'a pas besoin qu'on l'ait lu pour être révélateur de notre personnalité : mélange de notre culture idéale et de goûts propres.

J'étais invitée un jour chez un grand monsieur de la mode. Entre meubles de designers et photos incroyables tronait un ouvrage sur Mario Testino dédicacé et jamais vu ailleurs. On a les Coffee Table Books qu'on peut.
Dis moi ce que tu fais semblant de lire, je te dirais qui tu es.

15 mai 2009

DE L'INCOHÉRENCE DES MARQUES

Il y a des marques qui vous restent. Des marques avec lesquelles on a une histoire, un morceau de vie. Un jour, j'avais du me soumettre à cet exercice : choisir une marque et écrire pourquoi je l'aimais. On commence et on se rend vite compte que les premières qui nous viennent, ce ne sont pas pour leurs produits mais pour l'histoire qu'elles nous racontent, ce qu'elles représentent à nos yeux, la façon dont elles nous permettent de nous identifier à un groupe auquel on n'appartient pas nécessairement et l'histoire personnelle que l'on a avec elles.
Je me rappelle que celle que j'avais décrite, je l'avais choisie parce qu'elle me rappelait une période cool de ma vie.

Petit Bateau a une histoire avec celles qui la portent. Si elle me rappelle les filles du collège et leurs 'tu portes du 12 ans ou du 14 ans? HIHIHI', je n'ai pas de liens particuliers avec elle. Mais je ne peux pas m'empêcher de constater qu'elle bénéficie d'une certaine sympathie, mélange de traditions et de souvenirs de petites filles.

Et puis, j'ai trouvé qu'elle proposait quelque chose de nouveau. Ca a commencé par les photos avec les mecs de MGMT. Audacieux- ou inconscient? - de prendre un groupe dont le tube dit 'I'll move to Paris, shoot some heroin, and fuck with the stars. You man the island and the cocaine and the elegant cars' pour illustrer la marque des enfants, des filles-enfants et des mamans. Encore plus intelligent de ne pas le signifier pas un 'WOUWOU, regardez qui on a pris' sur la photo mais de laisser le buzz agir. Et puis là, la collaboration avec Kitsuné. J'ignore si l'idée vient d'un bureau de consulting ou a germé en interne mais elle est vraiment bonne. Une cohérence parfaite qui apporte du pointu à Petit Bateau et qui popularise Kitsuné, pas mal. Avec l'ouverture d'une boutique spécialement dédiée à l'adulte, je me disais véritablement que Petit Bateau amorçait un tournant intéressant.

MGMT pour Petit Bateau

Je passe à côté d'une boutique hier, intriguée. Entrée, je déchante un peu : quelques cotons plus légers mais toujours des débardeurs moulants dos nageur et autres, pas de quoi fantasmer. Je demande à la vendeuse où se trouvent les tee-shirts issus de la collaboration avec Kitsuné, imaginant déjà qu'il n'en reste plus un seul, pris d'assaut par des hordes de modeux et là, la réponse : 'On les expose pas, ils sont derrière, vous voulez voir lequel?'. Blague. Ils s'offrent un partenariat avec une excellente marque qui leur a valu plus d'encarts presse que tout ce qu'ils avaient fait ces dernières années et ils la rangent dans le placard du fond.

Kitsuné pour Petit Bateau

C'est le grand drame des marques, toujours vouloir faire plus pointu et plus jeune, alors qu'il existe un marché considérable pour les pas pointus et les pas jeunes. Mais s'ils veulent en faire, cela doit être cohérent à toutes les étapes, du plus amont au magasin. Moi qui n'avait jamais eu une idée très précise de l'importance du retail, je l'ai vu là de façon flagrante. Faites ce que vous voulez, si le magasin ne suit pas, cela ne sert à rien. A retenir.

2 mai 2009

LE SLIM EST A LA MODE

Les londoniens ont un look. Particulier, pointu, audacieux, qui vaut à la ville une réputation spéciale, ni volée, ni exagérée. La mode à Londres se diffuse comme une trainée de poudre.
A chaque voyage, la même conclusion. Les tendances sont adoptées rapidement, mais surtout, massivement. Dès qu'un nouveau mouvement voit le jour, les modeux se l'approprient tous, tout de suite. Loin d'un consensus mou et d'une diffusion en cascade tranquille.

La radicalité des mouvements peut donner de l'extérieur l'impression qu'ils sont anecdotiques. La presse internationale s'est amusée pendant des mois des looks d'Agyness Deyn, mettant en avant son style TELLEMENT personnel, alors qu'il s'agit de celui de toutes les minettes de Shoreditch, ni plus, ni moins. Il était plus compréhensible pour certains de le faire passer pour un déguisement plutôt que de se rendre compte qu'il s'agissait de la tenue de tous les jours de centaines de londoniennes.


Pour les adeptes du savant mélange de fripes et d'extravagance, Londres a toujours fait figure de précurseur, initiateur de nouveau looks.
Du moins, c'est l'impression que j'avais, jusqu'à la semaine dernière.

Assise dans London Field, le parc qui longe le bobo-branché Broadway Market, je regardais les groupes de jeunes assis autour de moi. Le mélange pas très hétéroclite de ce repère de londonniens faisant un break entre la sortie de la veille et le prochaine after se révela un poste d'observation idéal.
Et là, pas de surprises, pas de nouveautés, pas de nouveaux looks. Les filles portent toujours des slims (donc un étrange legging sur lequel sont dessinées des coutures pour faire croire à un jean ultra-moulant), les tops sont rétros et les accessoires pour cheveux pullulent. Ca rappelait simplement un croisement entre Amy Winehouse & Agyness Denn. Rien de nouveau depuis de nombreux mois.

Toute à ma hate de déclarer que Londres devenait ringard, je me suis tout de même retenue. Face au ralentissement du phénomène des tendances, face au luxe bling-bling qui s'efface devant les marques Hermes-isantes, loin de la fast fashion, loins des hits bags, ces filles habillées comme 1 an auparavant avaient-elles un temps de retard ou un temps d'avance ?