20 novembre 2009

LE POIDS DES PHOTOS

Si Paris Match devait réécrire aujourd'hui la phrase qui les a rendu célèbre 'le poids des mots, le choc des photos', les choses seraient-elles les mêmes ? A quel moment avons-nous glissé dans une société où l'image a plus de sens que les propos ? Rassurez-vous, je ne vais pas vous faire le laïus entendu mille fois sur la présence - omniprésence de la publicité dans notre environnement, ce n'est pas mon propos. Ce qui est intéressant, c'est la manière dont les personnes lamba, vous et moi, utilisent l'image tous les jours afin de communiquer ce qu'ils pensent.

Un message groupé où des gens répondent en citant des paroles de films ou de pubs, plus qu'en répondant à vos questions. Une discussion sur un chat et quelqu'un vous envoie un lien, plus que de vous parler. Les 140 caractères de twitter : combien d'url vers une image pour quelques mots échangés ?
Des blogs privilégient l'angle de l'image à celui des mots, comme littleornowords par exemple. A l'origine, le blog était un journal intime en ligne, on sait l'évolution qu'il a connu depuis, vers un média à part entière. Et pourtant, ceux qui ne regroupent que de l'image sont une nouvelle sorte de carnet de voyages. Pas de lien entre elles, pas de chronologies, les images s'enchaînent, entre envie, attirance formelle, coup de coeur ou pensée passagère. Quelque chose de finalement encore plus émotionnel que les mots, mais tout aussi personnel.

Internet a rendu si accessible les images et nous permet de récupérer en un clic celles d'un film culte ou celles d'une paire d'escarpins que l'on aimerait acheter, à l'autre bout du monde. Comme si nos esprits devenaient quelque part le moteur de recherche d'un gettyimages, en plus sensitif - quelle image va réussir à exprimer dans le même temps mélancolie + relation amoureuse + envie de voyage ?

Quand j'avais des cours de sémiologie, on m'apprenait le sens caché des images. On démontrait comment une publicité Dior pour un parfum pouvait communiquer 'Tu es un homme violent avec ta femme, tu devrais lui acheter ce parfum', alors que l'on ne voyait qu'une fille bouclée dans les rues de Paris. Que l'on aille si loin ou non, on ne peut nier que les images ont une fonction symbolique importante. Entre interprétation, subjectivité et sens caché, nous utilisons les images pour tout dire mais en maitrisons nous réellement le sens ?


Afin de ne pas interférer dans le discours, je ne joindrai pas de photos à ce post.
thanks to : UglySmile

13 novembre 2009

APPLE X PARIS

Je sors du Apple Store. Un peu décue, pas assez grand, pas assez flamboyant, pas assez de lumières. Des experts qui n'ont pas l'air assez experts. Une caisse étrange composée d'une table et de 3 pauvres power books. Apple qui joue normalement la carte de la grandiloquence fait dans le petit pour son premier store en France. Mais propose une autre version différente de la marque. Dans un pays pas spécialement accro aux nouvelles technologies, la marque met en avant son côté didactique : quasimment pas de shows de nouveaux appareils, on cède la place à de multiples ateliers. Le mot d'ordre ? L'initiation. Minitables et petits Macs pour enfants, ateliers de formation, de perfectionnement, genius bar pris d'assaut, il semble que plus que de démontrer sa puissance, la marque semble vouloir toucher les français non encore raliés à la marque, faire ressortir son accessibilité et se rendre plus populaire. Une décision assez dans l'air du temps si l'on regarde la nouvelle campagne de son principal concurrent pour le lancement de Windows 7 et son slogan, 'Windows 7, c'est moi'. Apple joue alors aussi la carte de la marque sympa, comme d'habitude, mais en remet une couche sur l'accessible.

La localisation témoigne aussi de cela. D'abord pressenti pour s'installer dans l'impressionnant 'Dock en Seine', le bâtiment conçu par le duo d'architectes Jakob et Macfarlane, Apple a abandonné le projet, non seulement à cause du retard pris par cette construction, mais sans doute aussi pour sa localisation. Intégrer le futur lieu fort du design à Paris, ok. Se retrouver dans un lieu sans accès, perdu, non. On privilégie donc le centre de Paris avec une adresse au coeur du premier arrondissement qui a laissé les parisiens sceptiques. En effet, pourquoi Apple a choisi de s'installer dans la galerie commerciale la plus ringarde de la capitale ?

Réponse 1 : Un Apple Store est un lieu de shopping destination. On y va pour y aller, on ne tombe pas dessus par hasard, au détour d'une promenade. Donc même là, on s'y rendra. Et si on laisse l'imagination s'envoler. Implantation d'Apple = attirance pour de nouvelles marques = possible rénovation du parc commercial du Carrousel du Louvre.

Réponse 2 : La preuve par l'image.

L'Apple Store de la 5ème avenue à New York



Le Apple Store de Paris


N'y aura t'il jamais un touriste pour croire que cette pyramide de verre, là, au milieu du Louvre, c'est la façade du Apple Store et pas un monument architectural ? Je ne parierai pas. Bien joué Apple.

6 novembre 2009

LES FILLES DE CET AGE

J'ai croisé quelques filles, en sortant de chez moi, le week-end dernier. On est samedi après-midi, on a 15 ans, et on retrouve nos copines pour une virée de shopping jusqu'à 18H. Jusque là, tout va bien, rien de bien différent de ce que je faisais quand j'avais leur âge. Si ce n'est, leur look...Que les codes évoluent, évidemment, la question n'est pas là, les tendances influant leur époque, je comprends bien que nos partis-pris stylistiques divergent - que les miens aient disparus a fait plus de bien que de mal à la mode de toutes façons. Non, ce qui me surprend, c'est le classicisme des choses : foulard esprit Hermès, bottines esprit Isabel Marant, veste noire sobre lointainement Balmainisante, sac Longchamp. C'est joli, c'est bien choisi, mais ce n'est ni plus ni moins que ce que porte leur grande soeur ou leur mère. Pas de rébellion, pas de volonté de démarcation, pas de détournement.



J'ai acheté un livre l'autre jour, le dictionnaire du look - je vous prie de vous arrêter une seconde sur le nom si bien choisi. Il ressemble à une version ratée de 'Streetstyles', le livre de Ted Polhemus sorti à l'occasion d'une exposition à Londres dans les 90's consacrée aux différents socio-styles (j'aurais dit 'tribus', y'a quelques années, mais même les mots se démodent alors...). Il dressait le portrait de différents groupes identitaires, souvent fondés autour de la musique : Mod's, Skinheads, Rockers... en s'arrêtant non seulement sur leur look, mais surtout sur leurs fondements et leurs valeurs partagées. Le dictionnaire du look propose lui de dresser un état des lieux des nouvelles identités : Fluokids, Emo, Electro rock...en décryptant leurs idées de manière caricaturale et en portant en plus un jugement de valeur. (J'ai une passion pour les gens qui prennent de haut tout ce qui a trait à la mode mais qui prennent quand même la peine d'écrire un livre dessus).

Tout ça pour dire que ce livre dresse le portrait de tout ce qui existe mais oublie finalement l'essentiel, ces jeunes filles sans rebellion, qui lisent le même Elle que leur grande soeur, qui suivent la mode sans faire d'excès, qui connaissent déjà les codes et les bons mélanges. Un ami me raconte qu'il se fait aborder par deux filles de 12/13 ans, dans la rue, la semaine dernière. Leur question ? 'Tu sais où est le Marc Jacobs?'.J'ai l'impression qu'il s'agit d'une vraie différence de fond avec mon époque. Tout le monde n'était pas à la mode, loin de là, mais si on m'avait dit que je m'habillais comme ma mère à 14 ans, je l'aurai mal pris. Les vêtements permettaient de se démarquer, de s'affirmer. Les 'tendances' n'étaient pas les mêmes pour les ados et les adultes. Et les filles les plus cools du collège avaient le look de leur âge, certainement pas celui d'une minette de 25 ans qui entre dans la vie professionnelle. 

 Peut-on construire son identité vestimentaire sans fausse note, dans la copie très qualibrée? Chacun de ceux de ma génération ont des souvenirs précis de leur plus violent parti-pris stylistique. Je ne saurais pas comment m'habiller si je n'avais pas eu tant de fautes de goûts. Mes looks sont comme des souvenirs, des marqueurs dans mon histoire, il s'en est passé des trucs entre mes cheveux noirs et mon blond actuel, tout un tas d'étapes. Je ressemblerai à quoi si je ne les avait pas eu ?